L’inaptitude professionnelle occupe une place singulière dans le droit du travail, en imposant à l’employeur de rechercher un reclassement conforme aux conclusions du médecin du travail. Lorsque cette recherche échoue, la loi prévoit que le salarié doit être informé, par écrit, des motifs s’opposant à sa réintégration. Pourtant, une décision récente souligne que le non-respect de cette formalité ne cause pas automatiquement un préjudice au salarié. Quelles en sont les conséquences concrètes ?
Lorsqu’un salarié inapte ne peut reprendre son poste, l’employeur se trouve tenu d’explorer les possibilités de reclassement au sein de l’entreprise ou du groupe. À la suite d’une recherche infructueuse, il doit notifier au salarié, avant tout éventuel licenciement pour inaptitude, les motifs pour lesquels aucun poste compatible n’a pu être proposé.
Objectif : Permettre au salarié de comprendre l’impossibilité de reclassement et, s’il l’estime nécessaire, de la contester. Cette mesure d’information vise en principe à garantir la loyauté et la transparence du processus.
Toutefois, l’absence de notification ou une notification lacunaire ne conduit pas nécessairement à l’allocation de dommages-intérêts. Le salarié doit prouver avoir subi un préjudice concret.
En cas d’inaptitude professionnelle, l’employeur se conforme à une double obligation :
Cette règle s’applique aussi bien au sein de l’établissement qu’au niveau du groupe, chaque fois que la structure comporte des entités susceptibles d’accueillir le salarié inapte. Dans le cadre d'un litige employeur et salarié, il est recommandé de consulter un avocat en droit du travail à Versailles.
La jurisprudence admet que l’employeur doit faire preuve de diligence et de transparence. Le manque d’efforts dans la recherche de poste ou l’absence de justification peut être sanctionné. Toutefois, le juge apprécie si l’omission d’informer le salarié lui a réellement causé un tort.
Dans un arrêt rendu au cours de l’année, la haute juridiction a considéré que la seule violation de l’obligation légale de notifier les motifs s’opposant au reclassement ne crée pas de préjudice de plein droit. Le salarié qui soutient avoir subi un dommage doit en établir la réalité.
Idée directrice : Même si la loi impose à l’employeur de motiver l’impossibilité de reclassement, l’assuré n’est pas dispensé de prouver qu’il a souffert, par exemple, d’une perte d’information cruciale ou d’un manque d’opportunité pour défendre ses droits.
La Cour de cassation adopte ainsi une approche cohérente avec son abandon de la théorie du “préjudice nécessaire” : désormais, sauf exception, chaque manquement ouvre droit à réparation si et seulement si le salarié démontre un préjudice distinct.
Sans l’information écrite, le salarié peut reprocher un défaut de mise en conformité. Néanmoins, la jurisprudence réitère que le salarié doit prouver comment cette absence lui a porté atteinte. En clair :
S’il ne justifie pas de l’un de ces éléments, la demande d’indemnisation peut être rejetée.
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Le salarié, convaincu d’être lésé, peut intenter une action en dommages-intérêts, en faisant valoir :
Mais, pour obtenir gain de cause, il lui incombe d’établir un préjudice effectif, distinct de la perte d’emploi en tant que telle (laquelle est indemnisée s’il n’y a pas de cause réelle et sérieuse au licenciement).
Même si le principe veut qu’il n’y ait plus d’indemnisation automatique, certaines situations se distinguent. Pour des raisons légales ou internationales, le juge admet que certains droits fondamentaux requièrent une réparation forfaitaire ou de plein droit.
Dans la majorité des contentieux, le salarié doit cependant faire la preuve d’un préjudice spécifique, né du fait de ne pas avoir été informé des motifs s’opposant à son reclassement.
Pour l’employeur, la démarche la plus sûre demeure de :
Si la notification est omise, le juge peut soupçonner un défaut de loyauté dans la recherche de reclassement. L’employeur, même s’il n’est pas condamné à réparer automatiquement, se trouve en position délicate pour prouver sa bonne foi.
En inaptitude d’origine professionnelle, l’employeur se heurte aussi à une obligation renforcée de reclassement. Le risque d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse est plus élevé si le plan de reclassement n’a pas été mené sérieusement. Nonobstant, l’information sur les motifs est un élément de procédure. Son non-respect ne crée pas mécaniquement un préjudice réparé.
La Cour de cassation rappelle que la violation de l’obligation d’informer le salarié des motifs de non-reclassement n’occasionne pas systématiquement un préjudice indemnisable. Pour autant, l’obligation légale subsiste et son non-respect peut affaiblir la défense de l’employeur, d’autant plus que la recherche de reclassement constitue le pivot de la protection du salarié inapte.
Principaux enseignements :
Si le droit du travail prévoit une indemnisation en cas de faute de l’employeur, le salarié doit toutefois prouver que cette faute, consistant à ne pas l’informer, l’a privé d’un droit ou d’une opportunité substantielle. La jurisprudence se veut donc équilibrée entre la protection du salarié inapte et la nécessité d’une démonstration du dommage subi.